Armel Le Bail Décembre
2000
DR2 - Matricule 51892
- Section 19
Laboratoire des
Fluorures - CNRS ESA 6010
Université du Maine,
Faculté des Sciences
Avenue Olivier
Messiaen
72085 LE MANS Cedex 9
( (33)
02 43 83 33 47
Fax (33) 02 43 83 35 06
E-mail alb@cristal.org
Web http://www.cristal.org/
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ESPOIR : un programme pour déterminer les structures cristallines
par méthode
Monte Carlo en diffractométrie des poudres.
Editorial
Le succès du DU (Diplôme d'Université) "Structure Determination by Powder Diffractometry" se confirme. L'offre a séduit 12 clients en 1999-2000, de niveau PhD, post-doc ou professionnel, dont un seul Français. Le cours (SDPD Internet Course http://sdpd.univ-lemans.fr/course/ ) est à la pointe des technologies de l'information puisqu'il n'est distribué que par correspondance sur Internet. Il se déroule en mode asynchrone, l'inscription est donc possible à tout instant. Après un an de rodage, l’Université du Maine a décidé de faire droit à ma demande de prise en compte du suivi des étudiants de ce DU sur la base de 5 heures ETD (Equivalent Travaux Dirigés) par étudiant (cf. copie de la lettre page 21). Les trois instructeurs du cours (Y. Laligant, chargé de recherche CNRS, A. Jouanneaux, Maître de conférence, et moi-même) sont donc maintenant rétribués. Le montant global des rétributions est inférieur au revenu produit par les droits d’inscription (de 1625 à 6500 F selon la situation sociale et géographique du client). Un des vecteurs publicitaires permettant d’atteindre les clients potentiels aura été la liste de discussion (SDPD Mailing list : http://www.cristal.org/sdpd/ , co-fondée il y a deux ans avec Lachlan Cranswick) qui rassemble plus de 280 abonnés.
La pénétration d’Internet dans le quotidien du métier de chercheur se poursuit. Sur mon site Web spécialisé en cristallographie, et qui pèse maintenant environ 100Mo, la rubrique des conférences en ligne s'est enrichie cette année de mes contributions à EPDIC-7 (7th European Powder Diffraction Conference, Barcelona, 20-23 May 2000) et au «Sixth International School and Workshop of Crystallography, 22-27 January 2000, Ismailia, Egypt». Une participation au récent SIZE/STRAIN Round Robin organisé par la CPD (Commission of Powder Diffraction) de l’IUCr (Davor Balzar) est en ligne, montrant une application de mon programme ARIT.
Le point sans aucun doute le plus marquant de mes travaux cette année aura été la sponsorisation du développement du logiciel ESPOIR (http://sdpd.univ-lemans.fr/sdpd/espoir/) par la Compagnie Dupont de Nemours à hauteur de 20000 US$. Ceci a permis, entre autres, d’engager sur deux mois un stagiaire de niveau licence de l’IUP MIME de l’Université du Maine pour réaliser une interface utilisateur graphique (voir page de garde du rapport). Les améliorations algorithmiques apportée à la version 3.5 sont conséquentes, incluant une reconnaissance automatique des angles de torsion des molécules et la création d’animations des évènements Monte Carlo acceptés au cours de la détermination de structure. Ce programme, distribué sous licence GPL (Gnu Public Licence), apparaît aujourd’hui concurrenciel, d’un point de vue graphique et facilité d’emploi, face aux poids-lourds du domaine privé tels que PowderSolve (MSI), Endeavour (Crystal-Impact) ou DASH (CCDC) qui sont hors de prix (20000 à 50000F pour une version monoposte, en offre académique). ESPOIR représente une alternative efficace destinée aux chercheurs académiques peu argentés. Une version tournant sur réseau d’ordinateurs en parallèle est en préparation.
· Editorial 2
· Index 3
· Curriculum-Vitae 4
· Rapport Scientifique 5
· Introduction 5
· Réseaux imparfaits (taille, distorsion) 5
· Verres fluorés, amorphes 6
· Cristallochimie de fluorures 7
· Diffusion X et/ou neutrons par les amorphes 8
· EXAFS 9
· Modélisation de la structure des amorphes 10
· Rietveld appliqué aux rayons X ou neutrons 11
· Détermination de structure (monocristaux) 11
· Détermination de structure ab initio sur poudre 12
· Cristallochimie des échanges Li/H dans les oxydes 13
· Cristallochimie de phosphates (...) 13
· Cristallochimie d'oxydes de cuivre, palladium et nickel, cobalt 14
· Problèmes de maclage 15
· Grandes mailles, superstructures 16
· Synthèse hydrothermale 16
· VRML (Virtual Reality Modeling Language)
17
· Reverse Monte Carlo 18
· Conclusions et perspectives 20
· Diplôme Universitaire en EAD : SDPD Internet Course 21
· Sélection des publications les plus représentatives 22
· Publication 1 23
· Publication 2 32
· Publication 3 36
· Publication 4 47
· Publication 5 68
Age : 50
Diplômes : Doctorat de 3éme Cycle (1976, Rennes), Doctorat D'Etat (1985, Le Mans).
Carrière hors CNRS : 1977-1981, Maître-Assistant à l'Université d'ORAN.
Carrière au CNRS : Octobre 1981, Attaché de Recherche ; Octobre 1985, Chargé de Recherche 1C ; Octobre 1990, Directeur de Recherche 2C.
Hébergé par : Université du Maine, Laboratoire des Fluorures, appellations CNRS successives : ERA 609, URA 449, ESA 6010, UMR 6010.
Mobilité thématique : Le nombre de publications relevant d'un savoir ou d'un savoir-faire personnel (plus ou moins étendu) concernant le thème est indiqué. Certains textes (114 publications traditionnelles dénombrées) peuvent combiner plusieurs de ces thèmes dont le caractère n'est pas toujours vertical. En quelque sorte, ce qui suit est une liste de domaines de compétences dont il faut exclure tout talent pratique pour l'élaboration (dans le cas de la synthèse hydrothermale, il serait donc plus juste de parler d'un savoir-faire-faire).
1976-2000 Réseaux imparfaits (taille, distorsion) 15
1976-2000 Programmation FORTRAN 30
1981-2000 Verres fluorés, amorphes 21
1981-2000 Cristallochimie de fluorures 39
1981-2000 Diffusion X et/ou neutrons par les amorphes 18
1981-1988 EXAFS 10
1983-2000 Modélisation de la structure des amorphes 9
1983-2000 Rietveld appliqué aux rayons X ou neutrons 52
1987-2000 Détermination de structure (monocristaux) 27
1987-2000 Détermination de structure ab initio sur poudre 31
1988-1995 Cristallochimie des échanges Li/H dans les oxydes 5
1988-2000 Cristallochimie de phosphates 19
1988-2000 Cristallochimie d'oxydes de cuivre, palladium... 13
1988-1996 Problèmes de maclage 8
1989-1995 Grandes mailles, superstructures 6
1990-1998
Synthèse hydrothermale 11
1996-2000
VRML (Virtual Reality Modeling Language) 5
1997-2000 Reverse Monte Carlo, recuit simulé 4
Activités d’enseignement : Responsable et créateur du Diplôme d’Université «Structure Determination by Powder Diffractometry», en EAD (Enseignement à Distance). Douze étudiants de niveau PhD ou post-doc inscrits en 1999-2000.
Ce rapport résume 24 années d'activités dans les métiers de la recherche (période post-thèse de troisième cycle soutenue à Rennes en 1976). C'est dire si il faut s'attendre à y trouver quelques toiles d'araignées ! C'est la 6ème année consécutive de présence du texte complet sur le World Wide Web ( http://www.cristal.org/rapport.html ).
L'ensemble de l'activité décrite dans ce rapport s'inscrit dans le cadre des objectifs de la section 19 du CNRS : élaboration, caractérisation et modélisation du solide. C'est essentiellement de la recherche dite fondamentale. Les références (1-114) peuvent être consultées sur le serveur http://www.cristal.org/rapport/publis.html ou bien dans le contexte des 600 et quelques publications du Laboratoire des Fluorures mises en ligne par mes soins à http://www.cristal.org/perl/pubfluo.html, avec moteur de recherche par mots-clés. Mais l’époque est aussi à d’autres moyens de communication des résultats scientifiques, autrement plus rapides que les publications traditionnelles, et bien plus ouverts aux critiques. Pour donner un exemple, tous les abonnés d’une liste de discussion à caractère scientifique peuvent intervenir, pas seulement deux referee anonymes. Souscrivez à la SDPD Mailing List http://www.egroups.com/list/sdpd/ si vous vous sentez concernés par les problèmes de détermination de structure par diffractométrie des poudres.
Réseaux imparfaits (taille, distorsion)
Les 15 publications rattachées à ce thème (1, 2, 3, 4, 10, 17, 19-20, 24, 51, 81, 98, 101, 108, 110) ont en commun un effort de modélisation des formes de raies de diffraction (rayons X, neutrons) en relation avec les effets de taille des cristallites et de distorsion du réseau cristallin. Un programme de calcul (SIZEDIST, mis au point lors de ma thèse de 3éme Cycle) est inscrit au World Directory of Powder Diffraction Programs (Smith & Gorter, J. Appl. Cryst. 24, 369-402, 1991). Je revendique avoir été un des premiers à introduire et à appliquer une modélisation des effets anisotropes d'élargissement des réflexions dans la méthode de Rietveld (programmes ARIT1 et ARIT4). Six conférences invitées sont en relation étroite avec ce thème : au LURE (Orsay, Mars 1986, "Imperfections cristallines et méthode de Rietveld : possibilités actuelles), au GALERNE-86 (Caen, Octobre 1986, "Analyse globale des spectres de diffraction de composés mal cristallisés"), au NIST (ancien NBS américain) pour le congrès international "Accuracy in Powder Diffraction II" (USA, Mai 1992, "Modelling anisotropic size/microstrain in Rietveld analysis"), au congrès SIZE-STRAIN'95 (Slovaquie, Août 1995, "Accounting for size/microstrain in whole powder pattern fitting") dont les proceedings viennent d'être publiés (1999) sous forme d'un livre aux Editions Oxford (avec pour titre "Defect and Microstructure Analysis by Diffraction"), à DXC-98 (47th Annual Denver Conference, Colorado USA, 2-6 Août 98), avec pour titre "New developments in microstructure analysis via Rietveld refinements" et enfin au Sixth International School and Workshop of Crystallography, 22-27 Janvier 2000, Ismailia, Egypte, avec pour titre «Advances in microstructure analysis by the Rietveld method». Plusieurs de ces conférences sont en ligne sur Internet, avec texte et transparents. Une contribution au SIZE/STRAIN Round Robin organisé en 2000 par la CPD (Commission of Powder Diffraction de l’IUCr) est déjà consultable sur Internet.
Size/Strain Round Robin : Diagramme de
diffraction synchrotron (ESRF-BM16) d’un échantillon de CeO2.
Modèlisation de l’effet de taille des grains et de distorsion du réseau
cristallin par la méthode de Rietveld (programme ARIT).
Les 21 articles rattachées à ce thème (5, 6, 7-8, 9, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 21, 22, 23, 26, 28, 36, 92, 108, 111, 113) ont en commun des tentatives d'approche de l'ordre local de divers matériaux amorphes au moyen de différentes techniques. Les expériences se sont généralement réalisées dans le cadre des "Très Grands Instruments" (EXAFS, diffraction nucléaire et magnétique des neutrons, diffraction des rayons X, modèlisation). Il s'agit en particulier de mon travail de thèse d'Etat dans la période 82-85. De nombreuses propositions d'expériences au LURE et à l'ILL ont été déposées et acceptées à cette époque. Le total des heures de faisceau employées se monte à 280 au synchrotron et 800 au réacteur à neutrons (en additionnant toutes les expériences réalisées également depuis lors, et pour d'autres thèmes).
Ces travaux ont été indirectement reconnus puisque des conférences invitées incluant tout ou partie des résultats relatifs aux verres fluorés ont été données par les autres co-signataires des articles (C. Jacoboni et R. De Pape). Des prix scientifiques ont été aussi distribués récompensant explicitement R. De Pape en particulier pour des travaux concernant les verres fluorés, entre autres (notamment le prix Aniuta Winter-Klein 1986 de l'Académie des Sciences). Les toutes dernières publications s'attachent à modéliser l'archétype des amorphes (SiO2, 92) par la méthode de Rietveld adaptée par mes soins, mais aussi des verres de formulation "NaPbM2F9" (M=Fe, V) (111) par Reverse Monte Carlo (RMC) et méthode de Rietveld, ainsi que ZnCl2 amorphe (110). Un article (113) compare les méthodes RMC et RDM (Rietveld for Disordered Materials), ce travail ayant été présenté comme poster au congrès Inorganic Materials de Versailles en septembre 1998. Une invitation à donner une conférence au Sixth International School and Workshop of Crystallography, 22-27 Janvier 2000, Ismailia, Egypte, est à signaler, avec pour titre « Combining the Reverse Monte Carlo and the Rietveld Methods for Amorphous Materials Structure Modelling ».
Les 38 publications rattachées à ce thème (18, 19, 20, 25, 27, 35, 37, 39, 42, 45, 46, 47, 48, 50, 52, 53, 54, 55, 56, 58, 60, 62, 63, 71, 72, 74, 75, 76, 79, 80, 84, 85, 86, 91, 97, 100, 102, 104) correspondent généralement à l'élaboration et/ou à la caractérisation structurale de fluorures inédits ou à l'étude de comportements particuliers de fluorures connus. Certaines des phases mises en évidence et caractérisées sont peu banales. Le plus bel exemple est celui de t-AlF3 (79): trouver, aujourd'hui encore, une géométrie vraiment nouvelle pour une stoechiométrie aussi simple est absolument exceptionnel. Cette phase est dans la collection des « Molecules of the Month » http://origin.ch.ic.ac.uk/motm/ . Des formes inédites de g-CsAlF4 (75), de g-BaZrF6 (80) et de a'-BaFeF5 (91) sont également surprenantes dans des systèmes qui ont été déjà tellement fouillés. Autre curiosité: K2(H5O2)Al2F9 (76) qui se prépare par chimie "ultra-douce". Il faut laisser évoluer spontanément K(H3O)2AlF6 dans un tiroir pendant un an... et se rendre compte que ce n'est plus la mëme phase ! (observation au bénéfice de H. Duroy). La thermodiffractométrie de cette phase conduit à une variété jusqu'alors inconnue de KAlF4 dont la structure reste à déterminer sur poudre (elle résiste... malgré l'annonce sur Internet de son existence et la publication des valeurs numériques de son diagramme de diffraction). Ces phases nouvelles peuvent être classées en plusieurs familles dont certaines ne se rattachent à aucune décrite jusqu'alors dans les grandes revues de cristallochimie des fluorures. Le document "6-Connected 3d Nets", publié sur Internet et "postérisé" aux journées de la division Chimie du Solide de la SFC (Paris, 1996), fait le point sur les réseaux tridimensionnels d’octaèdres connectés exclusivement par sommets, une famille qui s’est considérablement agrandie ces 10 dernières années. Les dernières structures de fluorures déterminées sont celles de Sr5Zr3F22 (97), BaGaF5.2H2O (100), a-Ba2ZrF8 (102) (les deux dernières par diffractométrie de poudre, rayonnement synchrotron), et enfin de a-NaCaAlF6 (104), un travail subventionné par la société Hydro-Aluminum (cette structure leur manquait pour réaliser des analyses quantitatives d’échantillons trempés de bains de fluorures fondus utilisés en production de l’aluminium).
Diffusion X et/ou neutrons par les amorphes
Ces techniques étaient incontournables pour la caractérisation de la structure des verres fluorés. Plusieurs familles de verres ont été analysées et les résultats consignés dans 19 publications (5, 6-8, 9, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 26, 28, 36, 92, 106, 108, 109, 113).
L'ordre à courte distance confirme la spécificité des verres à base d'éléments de transition 3d : le motif est octaèdrique. Des informations sur l'ordre à moyenne distance ont été extraites en diffraction de neutrons : i) sur la base d'une hypothèse de substitution isomorphe Fe3+/V3+ (fortement étayée par la cristallochimie des fluorures) ; ii) en exploitant les fonctions de corrélation magnétiques des éléments 3d présents (Mn2+, Fe3+...) ; iii) par modèlisation de structure avec comparaison quantitative des fonctions d'interférence observées et calculées, X et neutrons. Ces mêmes verres continuent, aujourd'hui encore, à faire l'objet de thèses consistant chacune à les passer au crible d'une technique différente (RMN du fluor, RPE, RAMAN...), la conclusion reste invariable : coordination octaèdrique des éléments 3d, est-ce bien utile de continuer à chercher ? Tout le problème des amorphes est que, par définition, leur structure est floue. On peut donc continuer les tentatives de "mise au point" ad vitam aeternam, ce sera toujours aussi flou.
En 1981 les problèmes posés au Laboratoire des Fluorures susceptibles d'être résolus au moyen des techniques EXAFS concernaient la structure des verres fluorés et quelques composés cristallisés présentant un désordre statique (notamment les pyrochlores du type AMM'F6). Bien peu de laboratoires de chimie du solide avaient engagé un mouvement en direction de l'EXAFS à cette époque. J'ai obtenu d'Anne Sadoc et Jacqueline Petiau les sources de quelques programmes FORTRAN du LURE. Ils étaient encore bien rudimentaires et n'offraient pas toutes les options de traitement en développement rapide dans la littérature scientifique d'alors. Après adaptation et modification, une chaîne de programmes interactifs a servi au Mans à traiter environ 500 spectres EXAFS et XANES de 1982 à 1987 (250 heures de faisceau au LURE). Une dizaine de textes (5, 9, 12, 13, 18, 21, 22, 23, 28, 56) ont été publiés dont certains correspondent à des collaborations notamment avec F. Studer de Caen et J.P. Laval de Limoges. Pour ce qui concerne les fluorures d'éléments de transition 3d, au fond nous n'avons guère enfoncé que des portes ouvertes. L'environnement des cations dans les matériaux désordonnés a été trouvé complètement similaire à leur environnement dans les composés cristallins: coordinence octaèdrique. Ces résultats sans surprise expliquent sans aucun doute la fin de l'époque EXAFS au Laboratoire des Fluorures.
Modélisation de la structure des amorphes
A une époque de l'histoire de la modélisation de structure de SiO2 amorphe, tous les modèles dérivant des phases cristallines ont été considérés (modèles "quasi-cristallins", cette expression ayant été détournée depuis). J'ai appliqué cette démarche à un certain nombre de verres fluorés, avec cependant une innovation de taille: les coordonnées atomiques ainsi que les paramètres de maille du modèle initial (de type "periodic boundary") peuvent être affinés par mon programme de modélisation ARITVE pour faire évoluer les fonctions d'interférence observées et calculées vers le meilleur accord possible. Ce programme reste peu connu malgré les quelques applications à la structure des verres fluorés (11, 12, 16, 26, 36), il y a plus de 15 ans, remarquées par un des gourous de l'amorphographie (A.C. Wright, dans plusieurs articles de revue parus en particulier au Journal of non-Crystalline Solids 106, 1-16, 1988 et 123, 129-148, 1990). Une application récente d'ARITVE à la modèlisation de structure des liquides Al1-xMx (M = Mn ou FeCr) par M. Maret, P. Chieux, J.M. Dubois & A. Pasturel, J. Phys.: Condens. Matter 3, 2801, 1991 mérite d'être signalée. La qualité de l'adéquation entre modèle et expérience (fonctions d'interférence neutrons et X reproduites simultanément) fait figurer ces travaux parmi ceux qui présentent les meilleurs critères de reliabilité. La boucle a été bouclée beaucoup plus récemment lors de la modélisation de SiO2 amorphe (92). Le programme ARITVE a permis d'établir le modèle qui montre le meilleur accord entre les résultats expérimentaux de diffraction X et neutrons et les simulations associées à une structure moyenne tridimensionnelle de trétraèdres SiO4 exclusivement connectés par sommet. Les tout derniers travaux font état d'une comparaison de la méthode Reverse Monte Carlo avec la mienne (108, 109, 113).
Quelques publications récentes reprennent les résultats de modélisation de SiO2 pour des analyses quantitatives (Lucas Lutterotti :
http://www.ing.unitn.it/~luttero/Publications/EPDIC_V/silicate_glass.html ) et des modèlisations (Thomas Wieder : http://www.tu-darmstadt.de/fb/ms/fg/sf ).
Méthode de Rietveld appliquée aux rayons X ou
neutrons
La méthode de Rietveld était appliquée déjà relativement fréquemment au début des années 80 au Laboratoire des Fluorures (travaux de caractérisation en diffraction de neutrons à l'Institut Laue-Langevin: affinement de structure connue avec problème spécifique de localisation de lithium ou hydrogène/deutérium, ou détermination et affinement de structure magnétique). Pourtant, l'implantation d'une adaptation RX du programme de calcul au Mans n'a pas été immédiate. En effet les programmes de l'ILL ne proposaient encore en 1982-83 que des Gaussiennes ou des Lorentziennes : des profils totalement inadaptés à la diffraction X conventionnelle. J'ai opté à l'époque pour des profils non-analytiques décrits par des séries de Fourier. Ce choix était dicté par mon expérience préalable en analyse de profil des raies de diffraction. Dans une optique de traitement de spectres X de composés mal cristallisés par la méthode de Rietveld, il fallait convoluer (simplement multiplier dans l'espace de Fourier) la fonction instrumentale par les fonctions d'élargissement intrinsèques à l'échantillon (taille de grains, distorsions du réseau...). Plusieurs versions d’un programme Fortran ont vu le jour dont deux restent en semi-activité (ARIT1 et ARIT4). Leurs performances sont encore comparables (ou supérieures) à celles des programmes du type Rietveld avec profils analytiques les plus répandus (GSAS, DBW, RIETAN, LHPM, FULLPROF..etc; une confrontation internationale a eu lieu à laquelle j'ai participé (Rietveld Refinement Round Robin : J. Appl. Cryst. 25, 1992, 582-560 et 27, 1994, 802-844). Les 56 applications ont été variées, avec ou sans problème de cristallinité (17, 19, 20, 24, 27, 29, 31-34, 37-39, 41-44, 46, 48-51, 54, 56, 58, 60-62, 65-66, 73-76, 79, 84-85, 88-90, 93-97, 99-102, 104-108, 111). Ces programmes restent complexes à utiliser (et les miens figurent parmi les plus difficiles à cause de cet usage de séries de Fourier), quelques jours de stage ne suffisent certainement pas à un débutant en cristallographie pour faire le tour des difficultés. J’héberge sur mon serveur Web les archives de la liste de discussion Rietveld_l, et j’en suis un des participants les plus actifs http://sdpd.univ-lemans.fr/forum/rietveld_l/index.html.
Détermination de structure (monocristaux)
L'installation en 1987 d'un diffractomètre 4-cercles a eu un impact considérable sur les activités du Laboratoire des Fluorures, et sur les miennes. J'ai eu l'occasion de traiter avec succès 27 enregistrements, soit par les méthodes directes soit par la méthode de Patterson (30, 35, 42, 45-47, 52, 54-55, 57, 59, 63, 67-72, 74, 77, 80, 82, 84, 86-87, 91, 97). La technique et la méthodologie sont merveilleusement au point, c'est vrai, encore faut-il les maîtriser (ce qui n'est pas totalement mon cas puisque la dernière fois que j'ai collé un cristal remonte à 1975). Pourtant, il ne faut pas croire que l'on arrive à 100% de réussite si l'on se contente de traiter les programmes de calcul comme des boites noires. Au moins 25% des cas rencontrés au Mans ont résisté à une analyse standard, j'ai hérité plus qu'à mon tour d'un bon nombre de ces cas spéciaux (maclage, grandes mailles).
Détermination de structure ab initio sur poudre
Il s'agit là peut-être du plus gros "morceau" de ce dossier. C'est aussi en 1987 que s'est présentée pour moi l'occasion de tenter de déterminer une structure en absence d'un monocristal de taille convenable. Une petite dizaine de cas non-triviaux avaient été résolus jusqu'alors en diffraction X (conventionnelle ou rayonnement synchrotron) par les poudres. Je me suis trouvé d'emblée confronté avec le problème d'extraire efficacement l'intensité de 300 à plus de 1000 réflexions d'un spectre de diffraction. C'était déraisonable en mode manuel. Seule la méthode de Pawley permettait d'y arriver de façon automatique, mais par tronçons de 300 réflexions dans la version dont je disposais à l'époque, et avec des problèmes de stabilité. J'ai eu par nécessité l'idée d'une méthode qui pourrait permettre d'y arriver en une fois quelle que soit la taille du problème, car les intensités seraient exclues des paramètres affinés. L'algorithme procède par simple itération de la formule de décomposition de Rietveld. Le programme (ARITB) correspondant à cette méthode a autorisé la détermination de plus de 40 structures au laboratoire même. Bien évidemment, l'extraction des facteurs de structure n'est qu'une étape. Il a aussi été indispensable de maîtriser toutes les autres (de l'enregistrement d'un spectre optimal à l'indexation...etc). Plusieurs invitations à donner une conférence correspondent à ce thème : au congrès "Powder Diffraction" à Toulouse en 1990, satellite du 15ème congrès de l'International Union of Crystallography à Bordeaux et à ACA'97 à St. Louis, cette dernière conférence est totalement accessible sur Internet. Un contrat a été signé avec la société Procter & Gamble Pharmaceutical (New York) pour une tentative de détermination de structure sur poudre. Une banque de données basée au Mans rassemble la quasi-totalité des travaux réalisés dans cette sous-discipline reconnue comme un "domaine chaud" de la recherche encore aujourd'hui (SDPD-D : Structure Determination from Powder Diffraction-Database). On peut constater dans cette banque de données que l'algorithme d'extraction des facteurs de structure est incorporé sous le nom de "Le Bail method" dans les principaux programmes appliquant la méthode de Rietveld (GSAS, FULLPROF, MPROF...). A quoi sert cette banque de données ? C'est en quelque sorte l'article de revue le plus complet sur la question et dans lequel le débutant trouvera le catalogue commenté de toutes les stratégies employées par les experts de la discipline. Juste un témoignage de R.A. Young, daté du 22 Décembre 1995 : "Your message ... arrived just now as I was preparing to write you a thank you note for your continuing excellent work on the SDPD-D. It is surely a very valuable contribution to the crystallographic community. Although I have never done a real ab initio structure determination in my life, I found your 'precise' (maybe that word works here only in French) of your compendium invaluable in a couple of recent talks. It allowed me to make correct statements about a subject which is very important in PD but in which I have done no work." Le dernier ajout à cette banque de données est de taille. Il s'agit ni plus ni moins d'un didacticiel complet expliquant de A à Z comment déterminer une structure ab initio sur poudre. La version anglaise (5 cas d'école décrits) est plus complète que la version française (2 jeux de données sont traités seulement). Cette différence se justifie par une clientèle étrangère beaucoup plus nombreuse (10 fois plus de connexions au moins sur la version anglaise : plusieurs milliers de requêtes par an). La suite logique de cette histoire était la création d'un Diplôme d'Université sur le Campus Virtuel. C'est chose faite depuis novembre 1999 (voyez l'éditorial). L'article correspondant à la première application de la méthode Le Bail a été cité 144 fois de 1989 à juin 1997 (source ISI).
En juin 1998, Lachlan Cranswick et moi-même avons organisé le premier "Structure Determination by Powder Diffractometry Round Robin", au moyen exclusif des divers protocoles Internet (Web, FTP, Email...). Les résultats préliminaires ont été communiqués en août 1998 au congrès ECM-18 (Prague). Au vu de ces résultats, la détermination de structure par diffractométrie de poudre napparait pas encore comme vraiment routinière. Seuls deux participants sont parvenus à établir la structure du composé pharmaceutique tandis que la structure de [Co(NH3)5CO3]NO3•H2O (105) est restée indéterminée en dépit de 70 participants. Vous trouverez quelques détails à ce propos dans un article rédigé par le journaliste scientifique David Bradley, accessible par le Web à :
http://www.chemweb.com/alchem/alchem98/catalyst/ctold/ct_980911_xray_full.html
Cristallochimie des échanges Li/H dans les
oxydes
La délithiation d'oxydes complexes en milieu acide était (avant la « restructuration » de 1997) un des objectifs du thème III au Laboratoire des Fluorures (Chimie douce impliquant des modifications topotactiques ou la précipitation d'espèces métastables). Je suis intervenu pour l'identification et la caractérisation (neutrons, rayons X) des composés délithiés ou lithiés dans un nombre de cas suffisamment important pour en "connaître un bout": LiSbWO6 (29), LiNbWO6 (33, 34), LiSbO3 (44), Li2Ti3O7 (78). Tout ces articles sont co-signés par J.L. Fourquet. Certains des composés échangés présentent des propriétés physiques liées à la mobilité ionique des protons. Le plus intéressant (H2Ti3O7; (78)) est utilisé comme matériau de base dans l'élaboration de films électrochromes. Deux brevets ANVAR-CNRS ont été déposés par P.A. Gillet, J.L. Fourquet et O.Bohnke (FR90/07/226 "procédé de préparation de couches minces d'oxydes de métaux de transition" et FR90/07/227 "Nouveaux matériaux électrochromes et leur procédé de préparation", avec extension USA). Le thème "chimie douce" est décédé au cours de la dernière contractualisation - restructuration du Laboratoire des Fluorures, en tout cas officiellement.
Cristallochimie de phosphates, molybdates,
chromates, silicates (...)
Cette rubrique (ainsi que quelques autres) peut sembler incongrue lorsque l'on connait l'intitulé "Fluorures" du Laboratoire. Il y a une explication. En 1987, G. Férey et D. Beltran se rencontrent lors d'un congrès. D. Beltran dirige un étudiant en thèse (P. Amoros) qui a synthétisé une série de composés très finement pulvérulents dont la caractérisation structurale est de ce fait quasi-impossible. G. Férey connait mes talents en diffraction par les poudres. C'est le début d'une coopération terminée aujourd'hui. P. Amoros aura passé quatre mois en plusieurs séjours au Mans; je me suis déplacé à Valence. Les composés sont principalement des phosphates de vanadium précurseurs de (VO)2P2O7, catalyseur connu pour son rôle dans la synthèse de l'anhydride maléique. Les structures de A(VO2)(HPO4) (A = NH4+, K+, Rb+) (38), b et a-VO(HPO4).2H20 (41, 49) seront déterminées ab-initio sur poudre. P. Amoros sera initié aux méthodes mancelles de synthèse hydrothermale et deux phases seront synthétisées au Mans dont les structures seront établies sur monocristal: Na1+xV4P4O17(OH) (57) et a-NH4(VO2)(HPO4) (77). La thése de P. Amoros est principalement fondée sur ces résultats. D'autres articles sont parus (CoCl(H2PO2).H2O (67), Zn11(HPO3)8(OH)6 (87) et (VO(H2PO2).H2O, (89)). D. Beltran a donné au moins une conférence invitée dont le sujet reposait principalement sur ces travaux (40) et un article de revue est paru (64). D'autres travaux sur des phosphates sont la conséquence d'une expertise reconnue depuis cette collaboration, comme la détermination de la structure de Co3(HPO4)2(OH)2 (66) ou la re-détermination de celle de Na5V2P3O14.H2O (82).
Du côté des molybdates et chromates, les structures de FeVMoO7 (95), Fe4V2Mo3O20 (93), [Pd(NH3)4]Cr2O7 (90) sont de détermination plus récente. A signaler des collaborations nouvelles avec la Tunisie par l'intermédiaire de Y. Laligant pour Na2Ca(HPO4)2 (101), Li6P6O18 (103) et CdBa2(P2O7)(HPO4) (107), avec l'Australie pour K2TiSi3O9.H2O (99), et avec l’Angleterre pour Ga(HPO4)2F·H3N(CH2)3NH3·2H2O (114) les 7 dernières structures ayant été déterminées, non sans mal, par diffractométrie des poudres.
Oxydes de cuivre, palladium, métaux nobles,
nickel, cobalt
Il s'agit en gros de l'ex-Thème IV du laboratoire des Fluorures (ces thèmes vont et viennent à un tel point que cela devient difficile de fournir un rapport d'activité cohérent sur 20 ans) pour lequel je suis généralement intervenu (collaborations Y. Laligant et G. Férey en majorité) en cas de détermination de structure non-standard (poudre ou monocristal). Certains composés sont en relation avec les nouveaux supraconducteurs (Bi2Sr2CaCu2O8+delta (30); YBa2Cu(3-x)PdxOy (31)); d'autres en sont, en quelque sorte, des sous-produits (Ba2PdO3 (32), LiBiPd2O4 (43), Li8Bi2PdO8 (88)); un autre est un précurseur pour PdO (Pd(NO3)2(H2O)2 (65)); un autre est un homologue de synthèse d'un minéral naturel (Cu3V2O7(OH)2.2H2O (51)). [Pd(NH3)4]Cr2O7 (90) est de détermination plus récente. Il m'est arrivé, sinon d'avoir l'idée de synthèse, au moins de décider de tenter de caractériser des composés signalés depuis fort longtemps dans la littérature comme restant structuralement inconnus (NiV2O6 (61) et Li3Cu2O4 (83)). Certains travaux sont partie intégrante de conférences invitées (ex : G. Férey: "Synthetic homologs of copper containing minerals", Conférence NOBEL, Académie des Sciences de Suède, Stockholm, 1990). En relation avec ce thème et celui des déterminations de structure sur poudre, T. Hansen a séjourné un an au Mans comme post-doctorant Européen "Capital Humain et Mobilité" sous ma direction et sur le sujet "Nouveaux oxydes polycristallins de mercure et de métaux nobles. Caractérisation de structure ab initio par diffraction sur poudre". Deux publication sont parues (94, 96) en co-signature et une autre sous son seul nom. Il est aujourd'hui "permanent" à l'ILL, en charge du développement du multidétecteur de l'instrument D20, entre autres. Le travail de détermination de la structure de [Co(NH3)5CO3]NO3•H2O (107) en collaboration avec Jianghai Zhu (Beijing) peut être classé dans ce thème. Ce composé représente l'un des deux exemples choisis pour le SDPDRR (Structure Determination by Powder Diffractometry Round Robin) et dont aucun participant n’a pu proposer un modèle de structure.
Les structures déterminées en dépit d'un maclage sont rares (une centaine de structures clairement identifiées parmi les 50000 phases inorganiques de la banque de données ICSD). G. Sheldrick a introduit la possibilité de traiter certains types de maclage dans SHELXL-93 et SHELX97, il n'y a donc pas si longtemps. Il existait bien évidemment d'autres programmes auparavant, et notamment mon programme TMACLE. Six cas difficiles ont été traités avec ce dernier programme, dont Na3Sr4Al5F26 (45), Rb2NaAl6F21 (DEA de Y. Gao et (46)), Rb2NaAl3F12 (54) et [Cr(NH3)6][Ni(H2O)6]Cl5(NH4Cl)0.5 (59). Un des plus "joli" cas est celui de BaZr2F10.2H2O: (74) orthorhombique mais quasi-tétragonal. Le cas le plus audacieux a été celui de K3Ba7Al6F33Cl2 (86) pour lequel la structure n'a pu être décrite qu'en faisant appel à la fois à un désordre et à un maclage. Le manuscrit a fait face à 4 "reviewers" déployés en 3 vagues d'assaut (sans compter les interventions de l'éditeur et d'un co-éditeur) pour finir par être publié sans révision majeure: un détail qui démontre combien c'était "non-classique". Notez qu'un programme spécial, capable d'affiner une structure d'après des intensités observées représentant la somme des contributions d'au moins deux domaines ("Twin Lattice Symmetry"), n'est d'aucune utilité sans la bonne hypothèse de maclage. Le dernier cas traité à la fois par TMACLE et SHELXL-93 est celui de Sr5Zr3F22 (97) présentant une macle par inversion (le composé est non-centrosymmétrique et le maclage conduit à superposer les paires de Friedel hkl et -h-k-l de deux -ou plusieurs- individus). Il reste à mentionner b-AlF3 qui, lui, a fait l'objet d'un démaclage mathématique (35) permettant enfin d'établir rigoureusement une structure dont le type ne faisait certes aucun doute ("bronze hexagonal") mais dont le système complexe de basculement des octaèdres restait mystérieux. Une conférence a été donnée sur le thème "Twinning and Superstructures..." à l'Université de Valence (Espagne) en 1990.
Grandes mailles, superstructures
Les grandes mailles et/ou les superstructures posent des problèmes particulièrement délicats lors des tentatives de détermination de structure. Deux cas de grandes mailles (14x14x80 et 14x14x28Å), toutes deux de haute symétrie (ce qui n'arrangeait rien), correspondant à des alliages intermétalliques apparentés aux quasicristaux (Al59Cu5Li26Mg10 (69) et Al56(Cu,Zn)11Li33 (70)) sont restés quatre ans sans solution. Les structures sont vraiment de toute beauté et méritaient cet acharnement thérapeutique, outre l'intérêt industriel lointain pour ces alliages. Un cas est bien connu du milieu de la cristallochimie des fluorures puisque les synthèses de nombreux isotypes ont été signalées depuis 30 ans mais une structure établie seulement tout récemment (Rb2Cr5F17 (47)). Un autre exemple, également grand consommateur de temps de calcul et de réflexion, est celui de K5Cr10F31 (55) (chrome à valence mixte), un cas unique et remarquable montrant un ordre parfait Cr2+/Cr3+ avec certains Cr2+ en coordinence bipyramidale à base pentagonale (partie intégrante d'une conférence invitée de G. Férey: "Mixed valence compounds in solid state Chemistry", Ecole OTAN, Heraklion, Crète, 1990). Pb8MnFe2F24 (71) représente un cas très particulier de superstructure dérivée de la fluorine, présentant un ordre parfait, cependant très complexe et difficile à établir. Enfin, KCaAl2F9 (84) exhibe un extraordinaire empilement de 6 couches ordonnées de type "bronze hexagonal".
Des études systématiques ou ponctuelles en synthèse hydrothermale à moyenne/haute température (350-750°C) ont été pratiquées fréquemment au Laboratoire des Fluorures, notamment par M. Leblanc, et elles continuent (par exemple Na1+xV4P4O17(OH) (57)). A plus basse température (<250°C), les études ont été un peu plus ponctuelles jusqu'en 1990 (comme pour a-NH4(VO2)(HPO4) (77)). J'ai fait appliquer ce mode de synthèse de façon systématique (collaboration avec A.M. Mercier) à des systèmes binaires ou ternaires sélectionnés, en intervenant sur les concentrations de divers milieux liquides et des solides ainsi que sur les températures (60-250°C). Des séries importantes de phases nouvelles ont été décelées, inacessibles à plus haute température. Les quelques cas complètement caractérisés et publiés sont ceux de Pb8MnFe2F24 (71), Pb2MnFe2F12.3H2O (72) (dont la déshydratation et l'étude Mössbauer représentaient le sujet du stage de DEA de G. Decap, sous la direction de Y. Calage), de g-BaZrF6 (80) et de a'-BaFeF5 (91). Une autre étude en collaboration avec le groupe des verres fluorés est celle de BaZr2F10.2H2O (74). Enfin, la structure de Sr5Zr3F22 est parue en 1997 (98). Il s'agissait peut-être des six composés les plus "faciles" à caractériser car obtenus sous forme de monocristaux de taille suffisante. D'autres travaux sont en voie d'achèvement. Il reste vraiment beaucoup de nouvelles phases à identifier complètement, la plupart devront faire l'objet de déterminations de structure sur poudre, éventuellement à partir de mélanges. Les dernières publiées, BaGaF5.2H2O (100) et a-Ba2ZrF8 (102), font appel à la radiation synchrotron. S'il est vrai que la capacité à déterminer des structures sur poudre permet d'envisager des explorations de domaines quasiment vierges, du fait de conditions peu favorables à la croissance de cristaux, il n'en demeure pas moins que le seuil de difficulté pour aboutir à une complète caractérisation reste considérablement élevé, ainsi que le récent SDPDRR a pu le démontrer.
VRML
(Virtual Reality Modeling Language)
Les temps changent. L'époque des logiciels gratuits à finalité de recherche académique semble s'essoufler. La tendance actuelle est plutôt aux logiciels commerciaux. Les tarifs varient de quelques centaines à plusieurs milliers de francs pour chaque logiciel équipant un seul poste de travail. Certains atteignent des valeurs exhorbitantes comme CERIUS. La tendance est que chaque membre de laboratoire, jusqu'au thésard, ait un micro-ordinateur sur son propre bureau, connecté au réseau local et à Internet. Mais le coût des licences de logiciels ajouté à celui des machines, peut devenir prohibitif. Pour cette raison, il faut lutter contre la mercantilisation des moyens de recherche informatiques, mais aussi pour que la recherche académique ne perde pas le contrôle des principaux outils de travail que sont ces logiciels. Il est devenu urgent de maintenir à un niveau de qualité raisonnable des logiciels du domaine public. Bon nombre de ces logiciels ont une longue histoire, ils ont voyagé, été améliorés ou adaptés simultanément et indépendamment dans plusieurs laboratoires pour faire face à l'évolution des systèmes de contrôle et des machines et aux progrès des connaissances scientifiques. L'évolution en 20 ans des supports de l'information, de la carte perforée ou même du ruban perforé jusqu'aux bandes magnétiques ou disquettes est remarquable. Mais combien de logiciels se sont perdus au cours de ces fractures technologiques, éventuellement par lassitude de les réimplanter, lorsque les interfaces graphiques devenaient obsolètes par exemple (je parle en connaissance de cause, mes programmes EXAFS sont passés à la trappe). Internet par les services FTP anonymes et surtout par le World Wide Web, est une véritable mine de logiciels et d'information en général. Certaines disciplines sont vraiment sous-représentées sur Internet (le domaine des amorphes par exemple) mais ce n'est pas le cas de la cristallographie pour laquelle on assiste à la renaissance et réactualisation de logiciels anciens distribués sur le Web. Le programme STRUPLO n'était toujours pas accessible sur Internet en Janvier 1996. C'est pourtant avec ce logiciel que la quasi totalité des dessins de structures cristallines ont été réalisés pour les publications du Laboratoire des Fluorures (chacun sait la tendance des éléments 3d à l'environnement fluoré octaèdrique, ceci explique cela). Toutes les illustrations de structures du récent livre de A. Durif sur les phosphates sont réalisées au moyen de STRUPLO. Par besoin personnel motivé par la non-mise en commun réelle des logiciels commerciaux performants achetés par certaines équipes du laboratoire, j'ai décidé en 1996 de me servir de STRUPLO comme base d'un nouveau programme qui permettrait la création de fichiers en VRML visualisables en 3D à l'aide des puissants outils du Web (visualiseurs tels que CosmoPlayer associé à Netscape, ou autre). Ce nouveau programme, STRUVIR, a déjà été téléchargé plus de 4000 fois sur mon serveur, depuis l'annonce de la première version en février 1996, c'est une version mise à jour beta-3 qui circule aujourd'hui. Certes ce logiciel n'atteint pas la qualité de certains produits du commerce mais il est gratuit, la source est disponible et quiconque ayant une idée pour l'améliorer est donc en mesure de le faire, étant encouragé à laisser le programme dans le domaine public. Je me sers bien sûr personnellement de STRUVIR pour réaliser les figures de mes publications, un mode d'emploi hypertexte a été rendu disponible en Septembre 1996. Le programme a permis de préparer le poster "6-Connected 3D Nets" présenté aux Journées de la Division Chimie du Solide (SFC), Paris, 4-6 Septembre 1996. Ce poster est entièrement accessible sur Internet, le catalogue complet des réseaux 6-connectés peut-être exploré en 3D. Louis J. Farrugia a récemment porté STRUVIR sous Windows (http://www.chem.gla.ac.uk/~louis/struplo/ ).
Les moyens de visualisation en cristallographie ont atteint aujourd'hui un niveau de confort extraordinaire sur micro-ordinateur (en réalité, presque tout cela était déjà possible il y a 15 ans, mais sur des stations de travail dédiées hors de prix). Comprendre une structure lorsque l'on peut l'explorer de l'intérieur est véritablement plus aisé. STRUVIR avait été retenu par le CCP14 pour sa troisième mise à jour en Décembre 1996 (Collaborative Computational Project - basé à Daresbury - orienté vers la diffraction par les poudres et les moyens de détermination de structure des composés inorganiques et des molécules de petite taille). Une invitation à donner une conférence sur le thème "VRML as a Tool for Exploring Complex Structures" au XVIIème Congrès International de Cristallographie à Seattle (1996) témoigne de l'intérêt des cristallographes pour la visualisation 3D. La conférence complète (transparents, texte, objets 3D...) est accessible sur mon serveur. Une page informative sur les relations cristallographie-VRML intitulée "VRML - Virtual Reality Modeling Language" est maintenue et actualisée, en co-signature avec Alan Hewat. Cette page est insérée dans le document "A crystallographer's Guide to Internet Tools and Resources" sponsorisée par l'IUCr, éditée par Howard Flack, qui montre que la communauté des cristallographes est de plus en plus "branchée" et ce, à juste titre. Cerise sur le gateau, les principaux outils et langages du Web, dont le VRML, sont multi-plateforme. GLASSVIR est le tout dernier logiciel que j'ai créé dans ce domaine. Il permet la visualisation des modèles énormes de structures de verres issus du "Reverse Monte Carlo". Il s'adresse plutôt aux verres présentant des polyèdres bien définis comme les verres silicatés et leurs tétraèdres SiO4 ou encore certains verres fluorés fortement concentrés en éléments 3d présentant des octaèdres MF6. Un musée des sources (principalement Fortran) des programmes de cristallographie est disponible sur mon serveur Web : http://sdpd.univ-lemans.fr/museum/index.html. Georges Sheldrick lui-même a accepté d’y déposer les sources, toujours compilables d’ailleurs, de programmes mythiques comme SHELX-76, SHELXS-86.
La modélisation de structure par "Reverse Monte Carlo" a quelque peu bouleversé la discipline. Depuis une dizaine d'années, une centaine d'articles proposent des modèles pour toutes sortes de matériaux. La méthode semble être autant décriée par certains que portée aux nues par d'autres. Moi j'aime. J'ai réalisé la compilation des programmes essentiels afin qu'ils puissent s'exécuter sous Windows 95/98/NT (ils sont téléchargeables). J'y ai ajouté NOCHAOS, un programme qui permet de construire des configurations de départ qui ne soint pas complètement chaotiques mais respectent des critères de distance minimale (voir aussi GLASSVIR décrit au paragraphe précédent, pour une visualisation 3D des modèles). J'ai profité de l'annonce de "RMC Modelling Internet Conference 1997" pour envoyer une contribution ayant pour titre "Modelling the NaPbM2F9 (M = Fe, V) Fluoride Glass Structures" (109). Dans un travail plus récent (113), exposé en poster au congrès de Versailles Inorganic materials (septembre 1998), je compare les méthodes RMC et RDM (Rietveld for Disordered Materials) et montre que des modèles qui seraient satisfaisants par RDM peuvent servir, une fois agrandis sur la base d'une pseudo-périodicité, de points de départs à des modèles RMC sous contrainte.
ESPOIR est mon plus récent logiciel, en accès libre sur mon site Web. Il tente de concurrencer les logiciels commerciaux inaccessibles car hors de prix (Powder Solve, satellite de Cerius 2, Endeavour, DASH) dans le domaine de la détermination de structure par localisation de molécule. Il utilise la méthode Monte Carlo. Il a au moins attiré l'attention du secteur industriel en la personne de Richard Harlow, cristallographe bien connu travaillant pour la Dupont Company. Un contrat de 20000 US$ a permis de booster le développement d’ESPOIR en 2000 (voir l’éditorial du rapport). Le logiciel est distribué sous license GNU à http://www.cristal.org/sdpd/espoir/ , il a été téléchargé environ 150 fois depuis la publication de la version Windows disposant d’une interface utilisateur graphique (voir page de garde du rapport). Les applications ne se limitent pas à la localisation de molécules de forme connue au préalable, mais les structures peuvent aussi être déterminées à partir d’un modèle de départ complètement désordonné (mode « scratch »). C’est ainsi que la structure de La2W2O9 a été résolue à partir d’une combinaison des données de diffraction X et neutron sur poudre (publication à paraître).
Conclusions
et Perspectives
Quels projets
pour les années à venir ? Les récentes conférences invitées donnent la
tendance : diffractométrie des poudres, se maintenir au top de cette
spécialité, contribuer à la faire évoluer et à se répandre (il semble bien que
le principal de l’expansion actuelle concerne la chimie organique et en
particulier la caractérisation de produits pharmaceutiques, ce qui déborde de
la Section 19 du CNRS…). Une continuation des activités dans le domaine de la
modèlisation de structure des amorphes est aussi très probable. Ces projets
passent sans aucun doute par le développement de nouvelles méthodes, de
nouveaux algorithmes, aussi par la maintenance et l’amélioration des anciennes
méthodes, et sont indissociables d’efforts à réaliser en programmation de
logiciels pour la cristallographie. Il n’est pas possible de laisser des
compagnies privées (MSI, Crystal Impact, Oxford Cryosystem, etc) verrouiller
complètement ce secteur et transformer les laboratoires de recherche académique
en vaches à lait.
Concernant les obligations de transmission du savoir, l'Université du Maine voit perdurer la décrue dans les inscriptions en license de chimie en présentiel, tandis que 19 étudiants sont inscrits dans la nouvelle licence en EAD (Enseignement à Distance). Un seul étudiant est inscrit en DEA en 2000-2001 dans l’option Chimie du Solide (et donc au Laboratoire des Fluorures) du DEA de chimie de l’Université du Maine (contre une douzaine au total dans les deux autres options, polymères et chimie fine)… Il est donc encore une fois bien peu probable que vous me voyiez diriger une thèse en 2001 (j'estime de toutes façons être trop spécialisé pour diriger une thèse de chimiste généraliste). Mais si les inscriptions au Diplôme d’Université en EAD « SDPD Internet Course » se maintiennent dans les années qui viennent, je ne devrais pas manquer de contacts virtuels avec de nombreux étudiants de niveau PhD et post-doctorants. Maintenir au plus haut niveau un tel enseignement à distance n’est pas une mince affaire, dans la mesure où il s’agit essentiellement d’une formation pratique basée sur l’utilisation de logiciels constamment en évolution – sans compter sur la naissance permanente de nouveaux procédés.
Plus de 2000000 de requêtes de fichiers sur mon site Web de cristallographie et ses miroirs, depuis cinq ans de mise en service. Maintenir et actualiser la banque de données SDPD, animer la liste de discussion du même nom ( http://www.cristal.org/sdpd/ ) devraient m'occuper de façon de moins en moins négligeable.
Sur un plan purement chimique, aucun des composés signalés dans ce rapport ne semble posséder des propriétés exceptionnelles. Quelles seront les formules chimiques et les propriétés des fluorures et oxydes dont je ne manquerai certainement pas de déterminer les structures cristallines dans les années qui viennent, je ne saurais le dire.
A la demande de la section 19 du Comité National, sont jointes 5 publications.
1 - "t-AlF3: Crystal structure determination from X-ray powder diffraction data. A new MX3 corner-sharing octahedra 3D network." A. Le Bail, J.L. Fourquet and U. Bentrup, J. Solid State Chem. 100, 151-159 (1992).
Cette publication est représentative de mon activité dans les domaines de la détermination de structure par diffractométrie des poudres ainsi qu’en cristallochimie des fluorures. t-AlF3 est certainement un petit bijoux sous ces deux rapports.
2 - "Modelling the Silica Glass Structure by the Rietveld Method." A. Le Bail, J. Non-Cryst. Solids, 183, 39-42 (1995).
Il fallait oser affiner par moindres carrés les coordonnées atomiques d’un modèle moyen pour SiO2 amorphe, ainsi que les paramètres de la « maille moyenne »... Convaincu ? Pas convaincu ? En tout cas, la publication est parue.
3 - "Reverse Monte Carlo and
Rietveld Modelling of the NaPbM2F9 (M = Fe, V) Fluoride
Glass Structures." A. Le Bail, J.
Non -Cryst. Solids 271, 249-259 (2000).
Souvenez-vous,
j’ai été recruté au CNRS sur le thème de la caractérisation structurale des
verres fluorés, en 1981.
4
– “Accounting
for size and microstrain in whole-powder pattern fitting.” A. Le Bail, in :
Defect and Microstructure Analysis by Diffraction, R. Snyder, J. Fiala & H.
Bunge Editors, Oxford Science Publications, Chapter 22, 535-555 (1999).
Un
chapitre de livre décrivant comment les effets de taille des cristallites et de
distorsion de réseau, sur l’élargissement des profils de raies de diffraction,
sont pris en compte dans les méthodes de simulation globable des diagrammes de
diffraction, et en particulier dans la méthode de Rietveld.
5
- "Trends
in structure determination by powder diffractometry." A. Le Bail, Advances
in Stucture Analysis, in press.
Une autre contribution à un livre à paraître. Le point en 1998 sur les tendances en matière de détermination de structure par diffractométrie des poudres.